Mondiaux de badminton – Paris 2025 : bilan des français

En récoltant la deuxième médaille mondiale de son histoire, cette fois avec des joueurs formés sur son territoire, le badminton français aura vécu des Championnats du monde à domicile conformes à ses attentes. Mais il attend plus dans les prochaines années.

Pour l’ambiance, les Championnats du monde de badminton organisés cette semaine à Paris laisseront un souvenir impérissable à ceux qui y ont participé. Engagés en demi-finales du double mixte, où ils se sont inclinés ce samedi, Delphine Delrue et Thom Gicquel (n° 8) sont arrivés sur le court portés par une vague qu’ils n’avaient encore jamais surfée. « Sur le clapping avant l’entrée, j’étais dans « Gladiator », jubilait Gicquel après la rencontre. J’étais Maximus qui entre dans Rome, c’était stylé. »

Au-delà de l’adrénaline, ces Mondiaux auront rapporté à la paire française une médaille de bronze, la deuxième des Bleus depuis celle de Hongyan Pi en simple dames en 2009. Après des années passées dans un relatif anonymat sur la scène internationale, dépendant du seul Brice Leverdez, le bad français peut d’autant plus s’en réjouir qu’il a placé trois joueurs en 8es de finale du simple hommes. Il pouvait peut-être prétendre à mieux dès cette année, mais l’horizon semble prometteur.

 

Une médaille en avance sur les objectifs

Avec cinq représentants dans le top 20 mondial répartis sur trois tableaux, la France abordait la compétition avec du potentiel. Particulièrement en simple hommes avec Alex Lanier (n°7), Christo Popov (n°10) et Toma Junior Popov (n°15). Les trois ont atteint les huitièmes de finale mais ne les ont pas dépassés. Pour les frères Popov, l’exploit n’était pas loin face aux n°1 et 2 mondiaux. Pour Lanier, passé à côté du rendez-vous face au 16e mondial, la délégation française reconnaît une forme de déception. « Le seul regret, c’est peut-être Alex qui a raté un peu son match, commente Cyrille Gombrowicz, le directeur technique national (DTN) de la FFBaD. Il le sait, il l’a dit. Je lui apporte tout mon soutien. C’est un très grand joueur qui va devenir un énorme champion. Tout comme Christo et Toma qui nous ont fait vibrer. »

La médaille est donc venue du mixte Delrue/Gicquel (n° 8). La deuxième de l’histoire des Bleus mais la première obtenue par des joueurs formés sur le territoire, puisque Hongyan Pi était arrivée en France à 20 ans après son éclosion en Chine. La Fédération française la voulait mais elle n’en avait pas fait un objectif impérieux pour cette année. Gombrowicz la voyait sur l’olympiade menant à Los Angeles en 2028 : « C’est fait, cela donne peut-être la place à de nouvelles ambitions. Maintenant, on ne peut pas se satisfaire de bronze. La médaille qu’il faut aller chercher, c’est le titre de champion du monde. »

 

Une discipline plus exposée

Bienvenue pour Delrue et Gicquel, la médaille du mixte l’est aussi pour l’image du badminton qui n’aurait pas forcément bien encaissé une disette. La discipline a beaucoup communiqué ces derniers mois sur l’élan des JO, la hausse des licenciés et le besoin de reconnaissance. Sans résultat tangible, la crédibilité en aurait pris un coup.

Mais l’Adidas Arena s’est remplie au fil des jours, les Bleus ont fait vaciller les meilleurs et les performances ne sont pas passées inaperçues médiatiquement. Quel peut être l’impact d’une telle semaine ? Le résultat se mesurera sur le long terme et il demande à être consolidé par d’autres coups d’éclat.

Thom Gicquel attend en tout cas un éclairage plus fort sur ses smashes et ceux de ses partenaires : « J’espère que ça va créer des vocations. Et que ça va permettre, comme aux Jeux, de montrer ce qu’est le badminton de haut niveau. On veut faire comprendre que c’est un métier, un sport professionnel comme le foot, le volley, le basket, comme tous les sports co qui sont forts en France. On est capables de rivaliser contre les Asiatiques. »

De passage sur le site de la compétition en début de semaine, Marie Barsacq a insisté sur l’impact des Mondiaux pour inscrire le bad dans le paysage : « Au lendemain des Jeux de Paris 2024, c’est une véritable stratégie d’accueil des événements sportifs, a souligné la ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative. Ces événements sportifs sont des locomotives pour encourager les jeunes à rejoindre des clubs de sport. »

Un déficit chez les femmes à combler

Si les Mondiaux ont beaucoup exposé les Français, ils ont moins montré de Françaises, principalement représentées par Delphine Delrue. En simple dames, les deux premières joueuses émergent aux 77e et 91e rangs, respectivement pour Léonice Huet et Anna Tatranova. Le reflet d’une faiblesse dans les tableaux féminins auquel la FFBad veut s’attaquer. « C’est un énorme chantier pour moi », confie le DTN, qui compte mieux identifier les joueuses à potentiel et leur permettre de s’exprimer au haut niveau en maintenant « une élite resserrée ».

Alors que les filles se montrent plus souvent attirées par le double dames, la Fédération veut « réfléchir à un accompagnement spécifique pour les féminines afin de ne pas les perdre. Il faut faire en sorte que, lorsqu’elles ont des moments difficiles dans leur carrière, on les soutienne sur le long terme ».

Face à un problème aussi profond, le travail mettra bien plus d’une olympiade pour porter ses fruits. En attendant, Gombrowicz attire l’attention sur le potentiel du double Margot Lambert/Camille Pognante, en pleine progression (42e mondiales). Le DTN leur voit « un niveau de top 10. On va pouvoir compter sur un double dames très bientôt. Ça va enrichir nos espoirs de médailles. »